Ce soir ce soir
Pour mon anniversaire
Je marcherai dans Paris
Dans Paris
Oubliant qui je suis
Je boirai tout le vin
De ce quartier latin
Je nagerai dans la Seine
Avec avec un vieux poème
Que je porte de loin loin
Je prendrai bien la main
De cette soldate blonde
Qui avait déserté
Un grand champ de bataille
Pour un rencard d’amour
Entre les jambes d'Eiffel
Je lui dirai les yeux dans les yeux :
est-ce vrai,
Tu as tué tant d’hommes
Tant d'hommes
Toi évidemment qui aimes
Tellement cet homme
Elle me répondra pas
Ce sera presque tant pis
C'est tout à fait son droit
Mais elle me sourira
Pour mon anniversaire
Ce que l’on ne comprendra pas
Je m’achèterai une tarte
Aux fraises
Ou aux prunes
Que je partagerai avec
Ces pigeons
Mes témoins
Ma table sera garnie
De six à dix fromages
Je commanderai du Brel
Du Sardou Soprano
Je garderai pour demain
Edith et Aznavour
Je laisserai sous la table
Un pourboire qui fait peur
Et je quitterai le bar
En feignant d’oublier
De régler l’addition
On m’appellera Monsieur
Je ne répondrai pas
La conscience tranquille
Je traverserai les rues
Sans attendre les feux verts
On saura que c'est moi
C'est mon anniversaire
Que Paris m’appartient
Comme la rue Lamarre
Ce soir je ne pleurerai pas
Les indiens d'Amérique
Les âmes des négriers
Les juifs
Les arabes
J’oublierai les héros
Qui moururent pour un drap
Et tous les misérables
Des machines humaines
Car ce soir je vais naître
Dans tes bras oh Paris
Toi qui produis le pire
Aussi bien que le meilleur
Mes enfants d’Haïti
Les as-tu reconnus
Ils attrapent ta langue
Sans rancune
Mais ils portent au fond d’eux
Les meurtrissures
Que tu ne sauras effacer
Ce soir ce soir
Pour mon anniversaire
Je t'épouserai aussi Paris
Jacob JEAN-JACQUES
Saint-Brice-sous-Forêt
26 mai 2024
Chant de la migration poème xxxi
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